
La pratique de l’aïkido mobilise la personne dans son entièreté, corps et esprit, en lui offrant la possibilité d’investir « l’ici et le maintenant ». La « pleine présence » 1Par « pleine présence », nous entendons une disposition intérieure qui permet d’être ouvert à soi, aux autres et à ce qui se passe. est un état particulier de réceptivité à soi et à l’environnement dont l’accès est rendu difficile par nos vies modernes, focalisées sur la performance, les tâches à faire et l’artificialisation du monde. Cet état est pourtant celui où l’on ressent avec le plus d’acuité plaisir et satisfaction de vivre.
En s’exerçant à s’ancrer physiquement et mentalement dans l’instant, l’aïkidoka cultive un art de vivre qui nourrit toutes les sphères de son quotidien. Et ce, à tous les âges de la vie.
Pour l’enfant (dès 9 ans) :
- Les apprentissages scolaires exigent beaucoup de l’enfant : motricités fine et globale (écriture, maniement des outils de dessin, maintien de la posture au bureau) ; acquisition des codes sociaux ; découverte de nouveaux lieux avec des règles distinctes (salles de classe, cantine, sorties extérieures).
- Pratiquer l’aïkido permet à l’enfant de renforcer les circuits neuronaux de l’apprentissage et de se développer harmonieusement. Il affine son schéma corporel et acquiert tonus, stabilité, souplesse et endurance. Il coordonne et dissocie ses gestes, avec une recherche de précision. Il exerce sa mémoire, ses capacités d’écoute et d’attention.
- S’habiller, entrer dans le dojo, s’échauffer et pratiquer… De l’habillage au salut de sortie, chaque moment du cours sollicite des aptitudes particulières qui sont travaillées de manière ludique et plaisante. Cette dimension de plaisir et de partage renforce les apprentissages et donne à l’enfant plus d’assurance pour faire face à un quotidien plein de défis et de nouveautés.
Voir ci-dessous, le tableau d’analyse d’activité de l’enfant.
Pour l’adolescent (dès 12 ans) :
- L’adolescence possède ses propres enjeux, notamment au niveau émotionnel et relationnel. D’autre part, le corps change : il peut être difficile de se l’approprier et de trouver sa place dans la relation aux autres.
- Pratiquer l’aïkido aide l’adolescent à rester en lien avec son corps, à lui faire confiance et à canaliser son énergie. Il peut ainsi renforcer sa volonté d’agir, affirmer son autonomie par ses choix grâce au vis-à-vis constructif des autres pratiquants, tout en renforçant ses capacités physiques. Il apprend à s’adapter à différents contextes martiaux et à veiller à sa propre sécurité. Il gagne également en clairvoyance et prend la juste distance avec les situations.
Pour l’adulte :
- Une fois adulte, nous avons à assumer une multiplicité de rôles dans le champ professionnel, familial ou encore amical. Le stress est omniprésent, dans un environnement qui promeut souvent la culture de la performance et du « toujours plus ». Stress qui peut être autant moteur que destructeur.
- Grâce à l’aïkido, l’adulte apprend à connaître ses limites tant physiques que mentales et à les repousser sans les dépasser. Il optimise ses ressources sans se mettre en danger et peut ensuite transférer aux autres domaines de sa vie les compétences acquises sur le tatami. Il acquiert les moyens de diminuer ses tensions internes et de résoudre favorablement les conflits, tout en entretenant sa condition physique.
En tant que discipline martiale, l’aïkido se déroule dans un cadre précis qui structure autant la pratique que le pratiquant. Ce dernier apprend à organiser ses mouvements dans le temps et dans l’espace, avec fluidité et économie de moyens, en suivant le principe de non résistance.
Les bienfaits liés à la pratique de l’aïkido sont attestés par un certain nombre d’études scientifiques. Nous pouvons citer entre autres apports :
- le développement harmonieux et équilibré du corps (travail bilatéral), dans le respect de la nature de chacun ;
- l’amélioration de la condition physique (endurance cardio-respiratoire) ;
- l’amélioration des facultés mentales (concentration, mémorisation, prise de décision) ;
- la réduction des émotions négatives et le renforcement des émotions positives ;
- la diminution de l’agressivité ;
- l’adoption d’une hygiène de vie globalement saine et équilibrée ;
- des effets favorables à court terme et qui perdurent à long terme.
Tableau d’analyse d’activité de l’enfant
Activité : se mettre en tenue
Séquençage_: | – prévoir le temps nécessaire – aller aux toilettes avant – planifier des étapes – latéraliser le keikogi (vêtement) + obi (ceinture) – enlever les bijoux s’il y en a |
Fonctions engagées : | – praxies – fonctions exécutives |
Transfert possible : | – gagner en autonomie dans la gestion de son quotidien, de ses affaires personnelles – gagner en sens de la responsabilité et de l’organisation – savoir évaluer ses propres besoins et son rythme pour commencer à l’heure |
Activité : entrer dans le dojo et y prendre place
Séquençage_: | – saluer le dojo – préparer les armes – monter sur le tatami – saluer en direction du kamiza – s’installer à sa place en – respectant la hiérarchie du dojo |
Fonctions engagées : | – cognition sociale – proprioception / gestion de l’espace – fonctions exécutives |
Transfert possible : | – intégrer les codes sociaux d’un lieu donné – favoriser l’adaptation à différents milieux sociaux – accéder à la symbolique des gestes/objets |
Activité : pratiquer mukso
Séquençage_: | – se concentrer – écouter – canaliser ses pensées/énergies – tenir une posture statique |
Fonctions engagées : | – fonctions exécutives – fonction mnésiques et attentionnelles |
Transfert possible : | – gagner en connaissance de soi – gagner en capacité à pouvoir ajuster son comportement à son état et à l’environnement – réguler son énergie – gagner en capacité à filtrer les informations et à ne retenir que celles que l’on juge pertinentes – choisir quoi faire de ses émotions |
Activité : faire la préparation (taïso)
Séquençage_: | – observer la démonstration – reproduire les gestes en opposé (≠ miroir) – entrer dans un rythme commun – explorer son corps – assimiler les routines de la pratique |
Fonctions engagées : | – fonctions motrices : schéma corporel, gestion de l’espace, contrôle neuro-musculaire – proprioception – équilibre – connaissance de ses limites |
Transfert possible : | – construire son schéma corporel – mesurer ses limites – doser ses gestes (force, souplesse, amplitude) |
Activité : pratiquer l’aïkido
Séquençage_: | – observer – travailler à 2-3 – communiquer en mode non verbal – respecter les consignes et le rythme du cours |
Fonctions engagées : | – proprioception – cognition sociale – fonctions exécutives : garder la consigne, rester concentré – attention : à soi, à l’autre – mémoire – capacité d’adaptation |
Transfert possible : | – adopter un comportement adapté aux situations – s’adapter à une autre personne, à une situation imprévue – gagner en capacité de collaboration – gagner en persévérance/patience – gagner en précision/efficacité – gagner en humilité – savoir coordonner le geste et la pensée – garder la conscience de soi, de son état, tout en étant engagé dans une action avec l’autre – agir en tant qu’individu au sein d’un groupe coordonné |
Activité : effectuer les saluts
Séquençage_: | |
Fonctions engagées : | – cognition sociale – gestion des émotions |
Transfert possible : | – intégrer les codes sociaux d’un lieu donné – favoriser l’adaptation à différents milieux sociaux – accéder à la symbolique des gestes/objets |
Activité : ranger
Séquençage_: | |
Fonctions engagées : | – praxies – fonctions exécutives |
Transfert possible : | – gagner en autonomie dans la gestion de son quotidien, de ses affaires personnelles – gagner en sens de la responsabilité et de l’organisation – savoir évaluer ses propres besoins et son rythme pour commencer à l’heure |
Activité : se changer
Séquençage_: | |
Fonctions engagées : | – praxies – fonctions exécutives |
Transfert possible : | – gagner en autonomie dans la gestion de son quotidien, de ses affaires personnelles – gagner en sens de la responsabilité et de l’organisation – savoir évaluer ses propres besoins et son rythme pour commencer à l’heure |
Auteure de l’article : Isaure Pontvianne, ergothérapeute D.E., pratiquante au dojo SNC AIKIDO
Sources :
- Boguszewski, D., Adamczyk, J. G., & Bialoszewski, D. (2019). Assessment of the health-related behaviors of men practicing combat sports and martial arts. Iranian journal of public health, 48(10), 1794.
- Lothes, J., Hakan, R., & Kassab, K. (2013). Aikido experience and its relation to mindfulness: A two-part study. Perceptual and motor skills, 116(1), 30-39.
- Peiró, P. S., & Laguna, L. S. (2021). Aikido como perspectiva de una actividad saludable. Medicina naturista, 15(2), 47-54.
- Stamenković, A., Manić, M., Roklicer, R., Trivić, T., Malović, P., & Drid, P. (2022). Effects of participating in martial arts in children: a systematic review. Children, 9(8), 1203.
- Szabolcs, Z., Szabo, A., & Köteles, F. (2019). Acute psychological effects of Aikido training. Baltic Journal of Sport and Health Sciences, 1(112).
- Zetaruk, M. N., Violan, M. A., Zurakowski, D., & Micheli, L. J. (2005). Injuries in martial arts: a comparison of five styles. British journal of sports medicine, 39(1), 29-33.
- Zsuzsanna, S. (2020). Aikido–from the viewpoints of psychology and sports physiology (Doctoral dissertation, EÖTVÖS LORÁND UNIVERSITY